Le numéro 5 de QPS – Les cahiers est consacré aux anticipations, à l’aversion aux pertes et au maintien en emploi des travailleurs âgés de 50 ans et plus durant la crise économique en Europe.
Nicolas Sirven (Université Paris Descartes) et Thomas Barnay (Université Paris-Est Créteil) ont travaillé sur l’emploi des seniors dans un contexte de crise économique dans le cadre, entre autres, du Forum Retraite organisé en 2014 par la direction des retraites et de la solidarité de la Caisse des Dépôts. Le nouveau cahier est la prolongation de leurs travaux.
Les auteurs y présentent l’estimation d’une forme réduite d’un modèle de dépendance des préférences au point de référence pour expliquer le maintien en emploi des travailleurs âgés européens, durant la crise économique de 2009. A partir des données individuelles de l’enquête SHARE (Survey of Health, Ageing and Retirement in Europe) entre 2006 et 2011, Nicolas Sirven et Thomas Barnay ont construit une mesure de “bonne”, “mauvaise” ou “absence de surprise” qui correspond à la différence entre l’évolution du niveau de vie constatée entre 2006 et 2011 et l’anticipation réalisée en 2006. Les auteurs établissent qu’en moyenne les travailleurs âgés, concernés par une perte non anticipée de leur niveau de vie, restent davantage en emploi. L’effet de “mauvaise surprise” apparaît significativement plus marqué que celui de “bonne surprise”, après contrôle des anticipations initiales, des changements survenus entre les deux dates et des déterminants classiques du maintien en emploi. Ces résultats sont interprétés comme une aversion aux pertes par rapport à un point de référence défini par des anticipations rationnelles. Ce phénomène d’aversion aux pertes est plus répandu parmi les hommes, les personnes averses au risque et celles dont l’espérance de vie estimée est élevée.