Les politiques jeunesse, un choix d'avenir
Formation, emploi, accès aux droits... Les parcours des jeunes sont tous différents. Des politiques innovantes s'élaborent pour répondre à ces attentes. La journée POPSI a réuni tous les acteurs des politiques sociales pour échanger sur ce sujet.
Le Mardi 6 décembre 2022
La formation, premier pas vers l’indépendance ?
Scolarité, apprentissage, formation constituent des étapes cruciales dans le parcours des plus jeunes. Les déterminants sociaux, culturels et économiques ont une incidence sur la capacité de chacun d’entre eux à choisir sa voie et à réussir son insertion professionnelle.
L’école pour tous
L’accès à l’école est universel. Le taux de scolarisation est massif, atteignant 94% pour les 17 ans1. Mais l’école reste un parcours inégalitaire. Les études Pisa2 ont ainsi mis en évidence le lien entre statut socio-économique et performance scolaire : 107 points de différence séparent les élèves issus de milieux favorisés et les autres. Cet écart est d’ailleurs supérieur aux moyennes observées dans les pays de l’OCDE.
De nombreux jeunes issus de familles défavorisées diminuent ou renoncent à leurs ambitions professionnelles même s’ils obtiennent de bons résultats : un sur cinq n’envisage pas de faire d’études supérieures.
Les chiffres
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16 ans fin de la scolarité
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27 ans début du plein emploi
Des inégalités
La période de transition entre la sortie de l’école et l’accès à un emploi stable est délicate pour les jeunes issus de milieux plus modestes. L’appartenance à un réseau est cruciale pour affronter cette étape charnière.
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Le soutien familial :
Ceux qui sont soutenus par leurs parents ont plus de chance de poursuivre des études alors que ceux qui doivent s’émanciper plus vite se retrouvent aussi plus rapidement dans une situation de précarité (alternance activité/inactivité).
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Le réseau de proximité :
Ceux qui sont accompagnés ont aussi de meilleures chances de s’insérer socialement comme l’illustre les parcours réussis de nombreux apprentis. Le maître d’apprentissage peut jouer un rôle décisif dans l’insertion sociale de son élève.
80 000 mineurs sans emploi, sans formation, sans études.
On les appelle les NEET (not in employement, education or training).3
Depuis 2020, l’obligation de se former est prolongée jusqu’à l’âge de 18 ans afin qu’aucun mineur ne se retrouve sans études, sans formation, sans emploi.
Trouver sa voie
En France, 46,3% des jeunes peu ou pas diplômés sont en situation de « neet » contre 8,6% de jeunes diplômés de l’enseignement supérieur.4 Ils ont des difficultés pour trouver un travail et sont plus exposées à la pauvreté et la précarité.
Avec le plan un jeune une solution, différentes pistes, comme le service civique ou les écoles de la deuxième chance, sont envisageables pour renforcer les compétences et identifier la bonne voie professionnelle
La revanche de l’apprentissage
La réforme de 2018 à revitalisé ce mode de professionnalisation : 720 000 jeunes sont devenus apprentis en 2021 contre 300 000 en 2017. Le plan « 1 jeune, 1 solution » est venu soutenir cet effort en mobilisant des aides pour l’apprentissage que les entreprises ont saisi. En 2020, 6 jeunes sur 10 ont pu trouver un emploi six mois après la sortie de leur apprentissage.
Voir POPSI – L’apprentissage, c’est l’école de la vie ! en vidéo
Lors de POPSI la journée des politiques sociales innovante en faveur de la jeunesse, Aurélien Cadiou, président de l'Association Nationale des Apprentis de France, présente les nombreux avantages offerts par l’apprentissage pour l’insertion des jeunes dans le monde du travail et dans la société. Revivez l'événement POPSI.
Le levier « mon compte formation »
Accessible dès l’âge de 15 ans, ce compte est aussi utile pour les étudiants exerçant un emploi ou pour les jeunes en apprentissage. Dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution », chacun peut consulter dans Mon Compte Formation, les formations proposées et de bénéficier d’abondements pour les formations dans les métiers en tension. 800 000 postes à pourvoir chaque année d’ici 2030 selon la Dares.
Différentes voies vers l’emploi
Entre ceux qui peinent à décrocher un travail et ceux qui veulent exercer un métier avec du sens, les parcours des jeunes vers l’emploi sont différents. Pour construire ces chemins d’insertion, des dispositifs peuvent être combinés pour développer des compétences et élaborer un projet sur mesure.
Emplois précaires ?
CDD, intérim, emplois aidés, vacations… Plus de la moitié des jeunes occupent des postes précaires et partagent la situation instable des salariés les moins qualifiés et les plus défavorisés. Trouver un logement, partir en vacances, fonder une famille… Les difficultés d’accès à l’emploi compliquent l’avenir de plusieurs jeunes et précipitent certains dans la pauvreté.
Les chiffres
Taux d'occupation d'un emploi précaire (CDD, intérim, apprentissage…) en 2020
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55,8 % des 15-25 ans
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12 % chez les 25-54 ans
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7,8 % des seniors
Les inégalités déjà constatées dans la période de formation se retrouvent et se renforcent à l’âge d’entrée dans la vie professionnelle.
Des inégalités de destin
Cette précarité d’emploi ne frappe pas tout le monde de la même façon. 12% des jeunes travailleurs diplômés du supérieur occupent un emploi temporaire contre 39% pour ceux qui n’ont aucun diplôme. Au cours de la crise sanitaire, ce sont les jeunes moins diplômés qui ont subi la plus forte hausse du chômage. La période du Covid a souligné les différences de condition de vie au sein d’une même classe d’âge. Ces inégalités ont aussi une dimension territoriale : les jeunes vivant en outre-mer ou dans les quartiers prioritaires de la ville rencontrent plus de difficultés à entrer dans une vie professionnelle stable.
Inclusion professionnelle
Le plan un jeune une solution a été lancé en 2020 : il combine des dispositifs existants et actionne de nouveaux leviers en faveur d’une meilleure insertion professionnelle des jeunes. Avec plus de 6,5 milliards investis, il s’agissait aussi de venir en aide aux 750 000 jeunes en train d’arriver sur un marché du travail impacté par la crise sanitaire. Plus récemment, en mars 2022, le dispositif « contrat engagement jeune » a été mis en place : il offre aux jeunes de moins de 26 un accompagnement intensif et une allocation jusqu’à 500€. Cette garantie repose sur un accompagnement global (emploi, mobilité, accès au logement, à la culture, au sport) et implique l'ensemble des collectivités.
Lors de POPSI la journée des politiques sociales innovante en faveur de la jeunesse, Thibaut Guilluy, Haut commissaire à l'inclusion dans l'emploi et à l'engagement des entreprises, présente les dispositifs « 1 jeune 1 solution » et le « contrat engagement jeunes ». Il revient sur les enjeux qui ont conduit à mettre en place ces deux dispositifs. Revivez l'événement POPSI.
Voir POPSI - 1 jeune, 1 solution… tout est dit ! en vidéo
Afin de soutenir les jeunes diplômés dans leur quête d’emploi, l’association « Nos quartiers ont du talent » les aide à développer leur réseau professionnel. Depuis 10 ans, la Caisse des dépôts, partenaire de l’association, propose à plusieurs jeunes de bénéficier d’un mentorat. En mars dernier, un atelier autour des métiers du développement durable a été organisé avec la Banque des Territoires. La Caisse des dépôts mène d’autres actions en faveur de l’emploi des jeunes, par exemple avec « Job à cœur » en accueillant 8 jeunes « sans réseau » pendant une semaine pour leur faire découvrir les métiers de la finance et des ressources humaines. Dans le cadre d’une initiative de la direction interministérielle du numérique et de l’association "moi dans 10 ans", 10 lycéennes seront sensibilisées à la question du numérique. Il s’agit ainsi de faire émerger des profils féminins dans le digital.
L’embellie ?
Avec la baisse du chômage observée ces dernières années, les conditions d’accès au travail s’améliorent chez les plus jeunes. Certains secteurs comme le commerce, la restauration ou la construction recrutent activement. La relance économique post covid a créé une conjoncture plus favorable pour l’embauche.
L’arrivée à la retraite de la génération baby-boom est également bénéfique pour l’emploi des jeunes générations.
Des différences existent aussi entre ceux qui souhaitent décrocher un emploi et ceux qui aspirent à plus de sens dans leur activité professionnelle.
Un job à impact ?
Les générations Y et Z veulent être utiles au quotidien. Certains se détournent des entreprises peu vertueuses en matière d’environnement ou peu respectueuses de la diversité. A y regarder de peu plus près c’est moins l’âge que le niveau de diplôme qui détermine ces comportements. Les titulaires de bac +2 ou moins âgés de moins de 27 ans sont moins enclins à vouloir « un job à impact » que les bacs + 5 et cela se vérifie toutes tranches d’âges confondues.
La grande démission ?
La crise du Covid a aussi fait bouger les lignes. Les jeunes salariés peu qualifiés travaillant dans des secteurs plus ou moins exposés comme la santé ou la restauration ont changé de regard sur leur pratique professionnelle. Souvent démotivés, ils choisissent de quitter leur poste. Même si on est loin de la grande démission observée aux Etats-Unis au second semestre 2020, ces nombreux départs expriment un rejet du modèle de vie de leurs parents.
Des jeunes trop souvent éloignés de leurs droits
Ignorance de leurs droits, défiance à l’égard des institutions… De nombreux jeunes ne perçoivent pas les aides auxquelles ils peuvent prétendre. Plusieurs actions sont menées sur les territoires pour « aller vers » ces jeunes en situation de non-recours.
L’entrée dans l’âge adulte
Le départ du domicile parental est une période délicate pour certains jeunes, notamment les plus défavorisés : la précarité des premiers emplois et la hausse des prix des logements compliquent leurs parcours. Ils dépendent souvent des soutiens familiaux… mais les parents n’ont pas tous les moyens suffisants pour aider leurs enfants comme ils le souhaiteraient. Là encore, les inégalités existantes se cumulent avec la dureté du contexte socio-économique.
Ces situations de précarité voire de pauvreté ont pu être aggravées par la crise sanitaire : près de 10 000 étudiants ont bénéficié de l’aide spécifique ponctuelle en avril 2021, soit 1,5 fois plus qu’avant la pandémie de Covid.
Des aides trop familiarisées ?
Les politiques publiques ont plutôt misé sur une familiarisation des aides sociales, retardant l’accès direct des plus jeunes à ces prestations et réservant plusieurs aides fiscales aux parents. L’obtention d’une bourse est ainsi dépendante des revenus des parents. Si l’aide personnalisée au logement, la prime d’activité, le contrat d’engagement jeune5 sont aujourd’hui accessibles dès l’âge de 18 ans et indépendamment des parents, le RSA ne reste percevable qu’à partir de 25 ans.
De nombreux jeunes ont des difficultés à percevoir les aides auxquelles ils pourraient prétendre : ces situations de non-recours concernent en priorité les chômeurs et les bas revenus.
Le non-recours aux droits
Un jeune sur deux serait aujourd’hui en situation de non-recours dans différents domaines (insertion, logement, santé…) selon une étude réalisée par l’Observatoire des non-recours aux droits et aux services (Odenore). Les jeunes qui méconnaissent leurs droits et les institutions qui délivrent ces aides ne peuvent bénéficier de ces prestations. De manière générale, ils sont peu sensibilisés aux enjeux de la protection sociale et ignorent les démarches à accomplir. Plus ils avancent en âge, plus ils se familiarisent avec ce système de protection.
Voir POPSI – Alerte économique pour la jeunesse ! en vidéo
Lors de POPSI la journée des politiques sociales innovante en faveur de la jeunesse, Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des Inégalités, propose un éclairage sur les problématiques économiques et sociales auxquelles la jeunesse est confrontée. Revivez l'événement POPSI.
Les chiffres
Part des jeunes rencontrant des difficultés dans leurs démarches administratives. Contre 21% dans l’ensemble de la population.
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37 % des 18-24 ans
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29 % des 25-34 ans
Une question de confiance
Le désintérêt voire la défiance que manifestent certains jeunes à l’égard des institutions explique aussi ces situations de non-recours. Cela concerne en premier lieu ceux qui ont vécu un décrochage scolaire : une expérience compliquée avec l’école peut les inciter à se détourner d’autres institutions. 8% des jeunes éprouvent aussi la crainte d’être perçu comme assisté et choisissent de « se débrouiller seul ».
On constate une forme de non-consentement qui articule une non-connaissance et une non-demande. Dans ce cas, le non-recours ne relève pas d’une problématique d’accès mais d’un choix de refuser une aide ou un service.
Héléna Revil, responsable scientifique de l’Odenore
Les nombreux changements de statut connus par les plus jeunes augmentent les risques de non-recours. Depuis une dizaine d’années les politiques publiques se sont saisies de ce problème pour améliorer l’accès aux aides.
Aller vers les plus jeunes
Avec le plan un jeune, une solution, plusieurs actions sont menées pour informer les jeunes en situation de précarité et/ou de non-recours. Un outil de simulation en ligne leur permet de connaitre rapidement quelles sont les prestations auxquelles ils peuvent prétendre (une quarantaine d’aides en tout).
Des initiatives se concrétisent aussi sur les territoires pour atteindre les plus vulnérables et offrir à chacun un accompagnement personnalisé dans la proximité. Par exemple, la démarche « territoires zéro non-recours » cherche à améliorer l’accès aux droits et aux services sociaux en proposant des accueils universels.
Jeunesse, la force d’engagement
Les jeunes, qui ont pour la majorité d’entre eux surmonté la délicate période de la crise sanitaire, veulent jouer un rôle citoyen. Ils sont de plus en plus nombreux à s’engager pour une cause. Les missions de Service Civique jouent aussi un levier de mobilisation citoyenne pour la jeune génération.
Un regain d’optimisme
Le moral des jeunes semble être reparti à la hausse après la difficile période du Covid. 66% des 18-30 ans se disent « confiants dans leur futur personnel dans les trois années qui viennent » selon une enquête réalisée par l’Injep et le Credoc (+ 6 points par rapport à 2021). Avec le retour à la vie normale, la jeunesse française, éprouvée par la crise sanitaire, a retrouvé sa capacité à se projeter dans l’avenir… même si les jeunes femmes affichent un état d’esprit moins positif que les jeunes hommes.
Si l’engagement bénévole progresse en France, on le doit en grande partie aux plus jeunes qui s’investissent de plus en plus en faveur d’une cause.
Un esprit citoyen
Depuis quelques années, plusieurs associations observent une hausse de l’engagement chez les plus jeunes. Ainsi, 16% des bénévoles actifs au sein des Petits Frères des Pauvres ont moins de 30 ans : ils représentent 28% des nouvelles arrivées en 2020, au plus fort de la crise sanitaire. Début 2022, la participation bénévole des jeunes à une cause a atteint son plus haut niveau depuis 2016 : 51% sont bénévoles occasionnels et 21% des 18-30 déclarent donner régulièrement de leur temps chaque semaine.
Les jeunes font davantage confiance aux citoyens (52%) pour faire bouger les choses devant l’Etat et les entreprises.
L’urgence environnementale
La crise écologique est une thématique centrale pour les plus les jeunes qui veulent mobiliser les autres générations en faveur de la protection de l’environnement. Les plus engagés dans cette cause estiment que le changement de comportement en matière environnementale relève du devoir citoyen. Les jeunes sont aussi très sensibles aux questions de discriminations (inégalités) dans leurs engagements ou prises de parole.
Le service civique
Inclusion socio-professionnelle et engagement citoyen
Créé en mars 2010, le Service Civique propose à des jeunes de 16 à 25 ans de réaliser des missions d’intérêt général (solidarité, lutte contre l’exclusion, éducation, environnement). Chaque jeune perçoit une indemnité mensuelle et bénéficie d’une formation civique et citoyenne.
76% des DRH considèrent que la mention Service Civique peut constituer un atout (IFOP)
Les missions de Service Civique peuvent favoriser l’insertion professionnelle en apportant une expérience et une formation. Son intégration dans le plan un jeune une solution a crédité cette thèse même si certains considèrent qu’il est plus un levier d’employabilité qu’un dispositif d’insertion.
74% des jeunes qui ont fait un Service Civique comptent voter
Une mission de Service Civique a aussi pour objectif « le renforcement de la cohésion nationale et de la mixité sociale. » Même si la majorité des jeunes choisissent le Service Civique pour avoir une expérience professionnelle et un revenu, cela donne à beaucoup d’entre eux une première expérience d’engagement et de découverte de l’intérêt général.
POPSI, la journée des politiques sociales innovantes
Le 30 novembre 2022, la direction des Politiques Sociales de la Caisse des Dépôts a rassemblé de nombreux acteurs pour venir témoigner et échanger sur la thématique de la jeunesse dans une société aux enjeux et aux défis multiples (travail, environnement, logement, santé). Conférences, masterclass, témoignages étaient aux rendez-vous. Pour revivre l'événement dans son intégralité, rendez-vous sur la page dédiée.
Sources
- Statistiques
- Le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) réalisé par l’OCDE évalue tous les 3 ans les compétences des élèves de 15 ans en lecture, sciences et mathématiques.
- Graphique
- Source Cereq.(les jeunes en situation de NEET, le rôle des compétences de base)
- Depuis mars 2022, le contrat d’engagement jeune remplace la Garantie jeune.